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La fermeture de la mine de Champagnac 1 : Une mine manquant de modernisation


 L’exploitation de Champagnac était déjà dans une situation délicate avant sa nationalisation en 1946, ce que plusieurs rapports réalisés à la suite de celle-ci soulignent, rappelant sa situation financière délicate, la vétusté de ses installations aussi bien au fond qu’en surface et sur les méthodes d’exploitation utilisées. En 1948 un rapport alarme également sur l’utilisation de matériel de la mine pour des usages extérieurs, sur un manque de rationalisation dans le personnel administratif, sur un laxisme dans l’organisation du travail et sur l’étalement de son activité[1]. La mine de Champagnac a, proportionnellement à sa production, trop de puits, les galeries de dessertes étaient longues et en surface l’exploitation s’étalait sur deux kilomètres. Le comité d’entreprise se plaint également du manque d’écoute de leurs conseils, du manque d’entretien du matériel et de m’absentéisme des ingénieurs[2].  C’est donc l’ensemble de l’organisation de la mine qui est en cause et qui nécessite une rationalisation pour accroitre son rendement.

Un rapport d’un ingénieur des mines de 1949 préconise ainsi de concentrer la production sur un seul puits, dans l’idéal le puits Prodelles, afin d'améliorer la productivité. Il conseille également de renforcer la mécanisation de l’exploitation, en effet la modernisation de la mine avait pris du retard, en 1954 elle utilisait encore majoritairement du boisage en bois et des chevaux[3], là où de nombreuses mines avaient remplacé, au moins partiellement, le bois par le métal et les chevaux pas l'électricité. La mine de Champagnac n’était cependant pas la seule mine française à accuser un retard sur ce plan-là, la modernisation des mines depuis 1930 ayant été très inégale à travers le pays[4]. Les puits étaient également mal équipés, par exemple le puits Prodelle qui nécessite en 1949 des aménagement urgents pour continuer de fonctionner[5]. Globalement, c’est l’ensemble des installations qui semblent être dans un mauvais état, d’autant plus que deux incendies leur ont causé des dommages en 1948, l’année 1948 fut d’ailleurs assez difficile puisqu’il fallut remplacer les prisonniers de guerre allemands et que la grève de 1948, même si elle ne pas très suivit sur Champagnac, ralentit l’exploitation[6], la production de la mine de Champagnac passa ainsi de 90 168 à 73 678 tonnes de 1947 à 1948[7]. Le manque de modernisation met donc en péril la pérennité de l’exploitation.

Ce rapport donne également des pistes sur les modes d’exploitations à adopter, il est alors préconisé de réduire le personnel au fond de 390 ouvriers à 204 en quelques années, ce qui pose déjà la question de la reconversion d’une partie des employés. La modernisation de l’exploitation est donc limitée par la nécessité de ne pas trop diminuer le personnel, ainsi que pas les besoins de formations de celui-ci pour se préparer à de nouvelles méthodes d’exploitation. La mine de Champagnac a de plus besoin d’autres investissements simplement pour maintenir son fonctionnement actuel, par exemple le lavoir, datant des années 1880[8], qui nécessite une modernisation estimée très couteuse par les Houillères d’Auvergne pour continuer de fonctionner. Un nouveau lavoir fut finalement construit en 1953, il permit une croissance du prix de vente du charbon de Champagnac de 3200 francs la tonne en 1952 à 3450 francs, mais cette augmentation fut bien inférieure aux espérances[9]. Les installations d’aérations et de sécurités sont également vétustes, ce qui fait l’objet de plusieurs plaintes répétées des délégués mineurs[10] et des rapports des ingénieurs des mines durant toutes les années 1950. D’anciens mineurs de Champagnac étant ensuite partis travailler dans d’autres mines témoignent également de l’écart d’équipement entre Champagnac et leur nouveau lieu de travail.

Ainsi dès sa nationalisation la mine de Champagnac était déjà dans une situation difficile, forçant les Houillères d’Auvergne à d’important investissements pour maintenir l’activité charbonnière sur Champagnac et pour tenter de la rendre rentable.

Des efforts de modernisations furent donc entrepris, permettant à la production de dépasser de nouveau les 100 000 tonnes dès 1949. De nouveaux investissements eurent ensuite lieux, un skip a été mis en place en 1953 pour la remonté du charbon et en 1954 pour moderniser l’exploitation, le boisage métallique commence ainsi à se développer pour les galeries d’accès[11]. Mais cette modernisation, si elle permit quelques progrès, ne donna pas les résultats escomptés, celle-ci restant insuffisante pour rattraper le retard de Champagnac.             





[1] « Lettre aux houillères d’Auvergne du syndicat des ouvriers mineurs et du comité d’entreprise, 3 mai 1948 », .

[2] « Lettre du sous-préfet de Mauriac au préfet du Cantal du 8 mai 1948 », .

[3] « Rapports annuels des délégués mineurs de 1954 », .

[4] Michel Cazin, Que sais-je? N° 465 Les mines, 1951, Paris, Presse Universitaire de France, .

[5] Verley, « HOULLERES DU BASSIN D’AUVERGNE : exploitation de Champagnac », 1949.

[6] Verley, « Exploitation de Champagnac : Rapport à monsieur le directeur général », 1949.

[7] Préfecture du Cantal, « Situation actuelle des MINES de CHAMPAGNAC », 1956.

[8] « Lettre de la Direction de l’Aménagement du territoire au préfet du Cantal du 19 septembre 1958 », .

[9] « Rapport de la préfecture du Cantal du 21 janvier 1956 », .

[10] « Rapports du délégué mineur Peyraud du 18 janvier 1956. », .

[11] Eugène Martre, « Le Bassin de Saignes-Champagnac », Revue de la Haute Auvergne, 1954, p. 1‑14.

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